Les applications de la blockchain sont nombreuses, et le secteur de la défense n’y échappe pas. Entre sécurité, résilience et traçabilité, la blockchain possède des caractéristiques clés pour répondre aux besoins de l’armée. Les États-Unis, l’Europe, la Russie, la Chine et l’Israël notamment ont déjà commencé à développer des logiciels basés sur cette technologie pour optimiser leurs opérations. Analysons dans cet article les enjeux et les possibilités que peut apporter la blockchain dans le domaine de la défense.
Une sécurisation des données renforcée
Les forces armées utilisent une quantité de données conséquente afin d’exercer et analyser leurs opérations. L’électronique et l’informatique sont partout : drones, armures assistées, systèmes de télécommunication, cyberattaques… Ces données, souvent critiques, ont besoin d’être stockées et transmises de manière fiable, rapide et sécurisée. Des exigences auxquelles la blockchain semble particulièrement adaptée :
- Fiabilité et intégrité des transferts d’information: grâce aux fonctions de hachage, il est très facile de détecter la moindre altération de données entre chaque bloc de la chaine. Si un intermédiaire doté de mauvaises intentions tente de falsifier des renseignements ou une communication, alors le hash du bloc sera différent du bloc « honnête » initialement transmis.
Lire plus : Qu’est-ce que le hachage ?
- Rapidité: à chaque validation de bloc, le registre est mis à jour de façon synchronisé sur l’ensemble des nœuds de la blockchain. Tous les membres d’un réseau peuvent donc avoir la même information à l’instant t, ce qui est un avantage majeur dans la prise de décision et la conduite des actions.
- Sécurité: les algorithmes de cryptographie avancés qui sont utilisés sur les réseaux blockchain garantissent une confidentialité des données qui transitent entre chaque partie prenante. Dans un secteur où des informations sensibles sont manipulées quotidiennement par les troupes, l’utilisation de la blockchain peut offrir une meilleure protection. A titre d’exemple, les États-Unis développent depuis 2015 une messagerie sécurisée basée sur la blockchain, permettant aux membres du ministère de la défense d’échanger sans divulguer l’émetteur, le destinataire ou le contenu des messages.
Des systèmes d’information plus résilients
La blockchain, par définition, est décentralisée. Chaque appareil informatique relié à une même blockchain possède la totalité des informations la concernant. Si un des nœuds est détruit ou perdu, l’information est conservée, car une copie des données est répartie au sein des autres nœuds. Cette résilience est une force à laquelle s’intéresse de près les armées. La blockchain permettrait de diminuer la dépendance aux relais d’informations par lesquels transitent actuellement les data, et qui sont généralement une cible d’attaque privilégiée.
En l’absence d’organe de contrôle unique, il devient plus difficile de couper toute communication au sein d’une entité équipée d’un système blockchain.
L’impact de la blockchain dans la logistique militaire
La blockchain peut apporter une aide significative dans le ravitaillement des troupes et la logistique en général. En termes de traçabilité, la blockchain permet de suivre et vérifier l’ensemble de la chaine d’approvisionnement, de la production jusqu’à la livraison. En notifiant automatiquement le moindre écart, cela permet de détecter toute anomalie (irrégularité, incident de parcours, lieu de distribution). Cela renforce non seulement la qualité et l’authenticité des équipements, mais réduit aussi le risque de contrefaçon ou de trafic d’armes.
Par ailleurs, l’utilisation de contrats intelligents permet d’automatiser la gestion des ressources, réduisant ainsi les coûts et les délais. Dès qu’une certaine condition est remplie, le programme informatique autonome peut déclencher immédiatement une action prédéfinie, telle que l’apport de ravitaillement ou le déploiement de nouvelles troupes.
Lire plus : Qu’est-ce qu’un Smart Contract ?
Cas d’usage : le projet FIBR²EO de l’Armée de Terre
L’Armée de Terre française effectue une veille permanente sur les nouvelles technologies afin de maintenir une excellence opérationnelle et s’adapter aux enjeux et menaces de demain. Le projet FIBR²EO est un exemple concret d’application de la blockchain sur les métiers de la défense. Fruit d’une collaboration entre la PME française Vistory et les fabricants industriels Nexter et Arquus, le projet concerne l’intégration d’un système d’information blockchain pour assurer le suivi de l’impression 3D de certaines pièces de rechange pour les véhicules terrestres. Ce système offre de nombreux avantages :
- Traçabilité: à chaque fois qu’un modèle 3D est utilisé pour imprimer une pièce, l’évènement est automatiquement inscrit dans le registre de la blockchain
- Immuabilité : une fois écrit, l’historique ne peut être altéré
- Intégrité: vérification que la pièce imprimée corresponde bien au fichier original
- Transparence: l’ensemble des évènements qui s’opèrent sur la blockchain (privée) est visible par tous les membres du réseau
Cette initiative prometteuse ouvre la porte à de nouvelles idées d’intégration de la blockchain dans le quotidien du personnel.
Conclusion sur la blockchain appliquée à la défense
Face aux nouvelles menaces cyber et la multiplication des technologies électroniques, que ce soit lors les conflits armés mais aussi en zone de paix, la blockchain apparait comme une opportunité très intéressante. Sa résilience, sa sécurité renforcée et sa transparence sont des atouts majeurs pour faciliter les opérations intérieures et extérieures. Elle n’est cependant pas sans inconvénient et présente quelques risques à prendre en considération. Le code informatique, généralement issu du secteur privé, doit être digne de confiance (intégrité de l’entreprise, qualité du code, expertise réelle). Ensuite, la multiplication des nœuds possédant les informations sensibles accroit les points d’attaque possible. Enfin, cette technologie nécessite d’être connectée à internet pour fonctionner, ce qui peut être problématique dans certaines zones de conflit.