Retrouvez l’entretien de Fatih Balyeli, CEO & Co-fondateur de Exaion, filiale du groupe EDF. Exaion a pour objectif d’accompagner le déploiement de projets innovants, émanant d’acteurs de toutes tailles, sur le Web3. Ils ont à cœur de conserver leur ADN et d’adopter une approche éco-responsable. Découvrez le parcours, les projets ou encore les conseils de notre intrapreneur !
Bonjour Fatih. Est-ce que tu peux te présenter et revenir sur ton parcours académique et professionnel ?
Bonjour, je m’appelle Fatih Balyeli. Je suis CEO et cofondateur d’Exaion. Moi, j’ai eu un parcours atypique. Sur le parcours académique j’ai différents diplômes. Je suis diplômé d’un master en finance de l’université Paris Dauphine, d’ingénierie des Mines ParisTech et de Tsinghua University, qui est un peu l’équivalent de Polytechnique en Chine, mais aussi en blockchain de l’université d’Oxford.
Alors sur le plan professionnel, il faut savoir que je viens d’une famille d’entrepreneurs. J’ai commencé ma carrière dans la finance en tant que trader chez BNP Paribas, à Hong Kong et à Londres. Ensuite, j’ai créé une première entreprise que j’ai fait tourner pendant deux ans, que j’ai revendue. Ensuite, j’ai rejoint le groupe EDF pour créer le fonds de Venture Capital, pour participer à la création du Fonds Vert Capital, qui s’appelle EDF Pulse Ventures.
Et en 2020, on a créé avec Laurent Exaion.
Tu es CEO et cofondateur d’Exaion, c’est ça ? Est-ce que tu peux nous expliquer le cœur de métier d’Exaion ?
Le cœur de métier et le moteur de notre entreprise, c’est vraiment la gestion des infrastructures. On a commencé par récupérer des supercalculateurs qui étaient déclassés au sein du groupe EDF, auquel on a donné une seconde vie. En fait, tous ces supercalculateurs qui sont sortis petit à petit, on les a architecturés, designés, équipés, organisés pour pouvoir adresser le marché du Web3.
Donc c’était notre point de départ et c’est le point fondamental. Puis maintenant, au-dessus, on rajoute des couches servicielles, des plateformes qui reposent sur cette infrastructure. Donc on a mis près de trois ans, trois ans et demi à mettre en place cette infrastructure qui est assez conséquente. On fait partie du top 500 et en termes de puissance de calcul dans le monde.
Et puis au-dessus, on est venu poser trois plateformes, trois services qui tournent autour du Web3. Le premier, qui est en ligne depuis le 12 décembre, c’est Exaion Node. Donc c’est de la gestion d’infrastructure blockchain. Le deuxième qui va arriver dans la foulée c’est Exaion studio pour les services de cloud 3D, metavers. Et le troisième qui va arriver, c’est Exaion compute. Et en fait Node, Studio et Compute donnent les trois briques qui constituent le métavers. Et un jour, on essaiera de faire converger ces trois plateformes pour avoir une plateforme qu’on pourra dénommer autour du Web3. Mais comme la maturité de ces produits ne sont pas les mêmes aujourd’hui et que les courbes d’adoption ne sont pas les mêmes, on est obligé de passer par trois services différents dans un premier temps, avant peut-être de les faire converger. Ce sont nos trois services. Ce qui est important pour nous, c’est de proposer des services décarbonés (ça, c’est notre cœur de métier et c’est l’ADN qu’on a hérité du groupe EDF), des services souverains et hyper sécurisés. C’est pareil, notre cœur de métier dans le groupe c’était la gestion des centrales nucléaires, donc la sécurité, c’est primordial pour nous. Et puis, troisièmement, proposer des services sur-mesure et réellement décentralisés, et se décentraliser par rapport aux grands acteurs d’Internet aujourd’hui.
Quels sont vos clients chez Exaion ? Est-ce que tu peux nous donner un exemple, un cas d’usage d’un de vos clients chez Exaion ?
Ce qui est intéressant dans nos profils à Laurent et à moi, c’est qu’on est très intéressés par la tech. Donc on connaît les communautés de tech, de développeurs, cet écosystème qui peut être assez discret et assez fermé. En même temps, on a travaillé dans les grandes institutions depuis plus d’une décennie maintenant, entre EDF, BNP, Areva… On a travaillé dans des structures très encadrées, très structurées, avec un niveau d’exigence très élevé.
Ce qui est bien, c’est qu’on a réussi, nous, en créant Exaion, à créer un pont entre un monde d’initiés et un monde très institutionnel. Et nos services nous ressemblent aussi, C’est-à-dire qu’Exaion Node, c’est un service qui va vraiment permettre aux grands institutionnels qui veulent se lancer dans la blockchain d’avoir une prise en main très rapide et très simple, hyper sécurisée, décarbonée : tout le volet RSE. Mais aussi c’est un service complètement adapté à leurs besoins. C’est-à-dire que si vous êtes un grand institutionnel comme une banque. Vous voulez émettre sur le marché une émission obligataire. Pour le compte d’une grande institution vous n’avez pas droit à l’erreur. Vous ne pouvez pas retarder l’émission obligataire d’une minute ou l’avancer d’une minute, l’annuler ou la rater.
Quand on a des clients comme ça, qui se disent on n’a pas le droit à l’erreur, je pense qu’Exaion est le partenaire idéal parce qu’on va vraiment trouver une solution pour eux. On va les suivre, eux et leur service en 24/7. On va avoir une infrastructure qui va être hyper scalable et on a des méthodes de travail et des process mis en place qui correspondent à ces grandes entreprises. On a vraiment repris tous les processus qui sont autour de la sécurité du travail, de la protection des données, de la qualité de service… On l’a vraiment calqué sur ce qui se passait chez EDF, chez nos anciens employeurs. Donc ça, ça rassure beaucoup. Par contre, on n’a pas oublié les autres, les initiés. Aujourd’hui, si vous allez sur Exaion Node, par exemple, il y a quatre offres. Il y a l’offre gratuite. Par exemple, vous êtes un développeur dans votre chambre. Vous voulez développer un projet blockchain mais vous n’avez pas forcément beaucoup d’argent ou vous n’allez pas faire tourner une application au niveau mondial. Et bien, Exaion Node est la solution gratuite qui leur est mise à disposition. Et quand je dis gratuite, elle est vraiment gratuite. Souvent, quand on est dans le Web2, si c’est gratuit c’est que c’est nous le produit. Nous on ne récupère pas de data, on n’a rien à vendre : on gère vraiment des services d’infrastructure blockchain. Donc nous on récolte pas les datas, et justement on combat ce côté Web2 de récupération des données à l’insu des clients pour les valoriser, les monétiser. Quand on dit que c’est gratuit, c’est vraiment gratuit. Puis ensuite, il y a trois offres qui vont crescendo : une pour le développeur plus/ou la petite start up Blockchain. L’autre, ça va être la PME, puis la dernière, ça va être le gros institutionnel ou gros industriel qui lui, n’a absolument pas droit à l’erreur. Il n’a pas le droit d’avoir une seconde de retard sur le projet. On couvre tout ce panel là.
Et des exemples ? Oui, j’en ai plein des exemples. Les plus significatifs sont Société Générale Forge avec Goldman Sachs et Santander. Ils ont travaillé avec la Banque européenne d’investissement pour une émission obligataire de 100 millions d’euros libellée en ethereum. Ils n’avaient pas le droit à l’erreur ou au retard. Ils sont donc venus demander les services d’Exaion. Comme ils sont encore avec nous deux ans plus tard, je pense qu’ils sont satisfaits de tous les services qu’on leur rend. BNP Paribas et EDF ont émis une obligation pour financer des projets autour des renouvelables, obligation qui a été tokenisée. Pareil, ils veulent distribuer ces tokens, gérer l’infrastructure ? Ils ont besoin d’un partenaire “institutional grade” à qui ils peuvent faire complètement confiance ? Ils passent par nous et aujourd’hui, je ne cite pas encore, mais on est en discussion avec les autres groupes bancaires français et étrangers. On travaille aussi avec EDF, on travaille avec d’autres énergéticiens. Bon, voilà, globalement, nos clients sont des boites du CAC40, des pure players Web3 comme pirate slap… Voilà pour en citer quelques-uns.
Lire plus : Qu’est-ce que l’interopérabilité des blockchains ?
Donc aujourd’hui le grand public français associe Exaion à EDF, donc forcément à l’état français. Pourtant vos clients sont à l’international. Qu’est-ce qui explique ce choix de positionnement ?
Alors ce n’est pas forcément un choix de positionnement, c’est c’est un fait. Quand on a créé Exaion avec Laurent, lui, il était responsable du data center du groupe EDF. Moi, j’étais directeur d’investissement dans le fonds de Venture Capital. On a vu qu’il y avait un trou dans la raquette de la blockchain parce qu’il n’y avait pas d’acteurs institutionnels tiers de confiance, intégrés de bout en bout sur ces solutions réellement décentralisées et avec une infra en propre, bref, qui couvre peu toute la chaîne de valeur. Donc on a vu ce manque. On a vu toutes les couches qu’il y avait dans la blockchain. On aurait pu se positionner sur une couche haute, purement applicative, protocolaire… On aurait pu le faire indépendamment du groupe EDF. Et là-dessus, il n’y aurait peut-être pas eu stratégiquement besoin d’avoir un actionnaire et un partenaire comme EDF.
Mais là où il y a de l’intérêt dans Exaion c’est vraiment se créer ce tiers de confiance d’avoir une chaîne de valeur complètement couverte, y compris l’infrastructure. Et ça, quand vous regardez les attributs d’EDF, c’est un super atout. Vous vous dites on est en train de parler d’un sujet énergivore, on est énergéticien, on parle d’infrastructure souveraine, on a les data centers du groupe EDF qui gère le nucléaire, on parle de décentralisation, on parle de cas d’usage énergétique (Ça tombe bien, c’est des cas d’usage qui vont venir potentiellement distribuer le groupe EDF demain, donc plutôt que de le subir, autant l’anticiper et prévoir et du coup se positionner et même être en mesure de vendre ces services à des tiers). Donc en fait, ça faisait complètement sens. On avait les besoins du marché et le trou du marché. On avait le savoir-faire et les avantages d’EDF. En fait, on s’est rendu compte que la rencontre des deux ça donnait Exaion. Donc on est hyper satisfait et content d’avoir EDF à notre capital, qui est l’actionnaire majoritaire de l’entreprise. Ce qui est bien aussi sur cet actionnaire là, c’est que c’est un actionnaire à long terme. Moi ce qui me gêne un peu, parce que j’ai travaillé aussi dans le Venture Capital, c’est que quand vous êtes dans une approche pure Venture Capital, vous êtes sur une approche “Comment est-ce que je rentabilise au plus vite une entreprise et comment je fais mon métier dans les cinq ans ?”. Donc la tendance que vous avez, c’est d’aller vers des lignes de code. Sauf que les sujets et les projets réellement “game changer”, ce ne sont pas que des lignes de code, il y a aussi du capex, il y a aussi de l’infra. Et aujourd’hui, quand vous parlez d’un sujet capexivore, il n’y a quasiment plus personne autour de la table. Ce n’est pas hyper rentable. On ne se voit pas faire x50 sur un sujet capexivore. J’en parlais hier avec des acteurs du quantique, parce qu’on a dans Exaion compute la partie HPC hybridation HPC quantique et quantique. Donc on a un acteur français qui vient de faire sa série B qui vient de lever des dizaines de millions d’euros et il l’a fait complètement à l’étranger. Il m’a dit “À chaque fois que j’allais pour pitché mon projet en France, on me disait “Non, c’est le truc capexivore, c’est quoi ton revenu récurrent et c’est quoi ton bénéfice ?”, tout en sachant qu’il est en train de créer un ordinateur quantique qui sera opérationnel pas avant 2030. Donc c’est juste impossible de répondre à cette question là et avoir une vision sur les 3 à 5 prochaines années.
Quand vous avez un actionnaire comme EDF. Bon, il ne fait pas non plus un investissement sur 50 ans et il veut quand même rentabiliser son investissement. Mais on n’est pas non plus sur une vision à trois ans, à cinq ans. Et puis EDF sait gérer des outils industriels : on gère des réacteurs nucléaires, des barrages hydroélectriques, on est dans le stockage à l’hydrogène, on est dans plein de projets industriels ! Et EDF est un industriel. Donc aller les pitcher en leur disant “oui y’aura les lignes de code, oui il y aura la plateforme, oui il y aura le serviciel, mais en dessous, faut qu’on crée l’infrastructure et ça, ça va prendre deux ou trois ans. Est ce que ça vous fait peur ?”. EDF ils nous disent que ça ne leur fait pas peur. C’est leur ADN de construire des gros outils industriels. Donc on a l’actionnaire qui correspond à notre ambition. Si c’était juste pour sortir quelques lignes de code, c’était peut-être pas la peine d’aller taper dans un acteur aussi high level, mais pour ce qu’on fait, la sécurité, l’infrastructure, la décentralisation, la décarbonation, l’outil industriel : pour moi, EDF est l’acteur idéal. Chacun a son actionnaire idéal mais pour nous, c’est EDF.
Donc tu as fait de l’intrapreneuriat chez EDF. Aujourd’hui ce n’est pas très commun en France de faire de l’intrapreneuriat. C’est quoi les avantages de faire ça et les limites par rapport à l’entrepreneuriat classique ?
Moi j’ai vu toutes les formules, j’ai vu le salariat, la formule entrepreneuriat tout seul, et puis la formule intrepreneuriat dans un grand groupe. L’avantage par rapport au salariat, c’est que vous définissez votre roadmap, vous avez la liberté de faire ce que vous avez envie de faire. Pour moi, l’entrepreneur, c’est quelqu’un qui règle des problèmes. Il n’y a rien de plus frustrant pour quelqu’un qui a la mentalité de régler des problèmes, de ne pas pouvoir les régler quand il est salarié, parce que ce n’est pas lui qui décide, pas lui qui fixe le budget, pas lui qui décide à la fin. Donc par rapport à ça, l’entrepreneuriat, c’est vraiment bien parce que vous êtes dans le cadre d’une grande structure, vous êtes encadré, il y a des processus qui sont mis en place, vous avez un suivi de la part de votre actionnaire donc vous êtes aidé mais en même temps vous avez la liberté de faire ce que vous avez envie de faire. Et sincèrement, je ne le dis pas parce que mon actionnaire c’est EDF mais ça fait trois ans qu’on a créé la boîte et EDF ne m’a jamais dit “Non, vous ne ferez jamais ça” sur aucun sujet. Après, comme on est des anciens des grandes institutions, on sait aussi jusqu’où on peut aller. Mais sincèrement, ils nous ont toujours laissé faire notre vie. Bien sûr, ils nous encadrent sur le suivi budgétaire, sur l’atteinte des objectifs, sur la sortie des produits. On leur remonte aussi les contrats qu’on signe, les exemples de business qu’on met en place. Donc ils suivent. Ça ne veut pas dire qu’ils ne regardent pas ce qu’on fait, mais par contre, ils nous laissent faire les choses. Et puis, comme on a des bons feedback de la part des clients et du marché, jusqu’à maintenant, et ça fait quasiment quatre ans maintenant qu’on est dans le cycle d’EDF, ils nous ont vraiment toujours laissé faire notre vie. Et quand vous voulez régler des problèmes, quand vous voyez qu’il y a un trou dans la raquette de la blockchain, quand vous voyez que l’industrie du métavers n’a pas vraiment une plateforme qui lui est dédiée et que vous vous dites “mais ça on peut le faire, ça on peut le faire, ça, on peut le faire… et puis l’infrastructure en dessous, c’est une infrastructure Web3, on va se donner les trois ans pour la construire”. Et bien on peut vraiment faire tout ça. On a les data center du Groupe EDF qui sont mis à disposition, on a les bons financements, suivis bien sûr. Donc on a les moyens techniques, on a les moyens infrastructurels, on a les moyens financiers, on a les moyens RH parce qu’on a aussi pas mal de gens qui font carrière chez EDF et qui veulent avoir aussi une expérience dans une filiale qui nous rejoignent, avec un retour possible dans le groupe pour ce qui veulent. Donc on est quand même bien accompagné, on est bien encadré. C’est pas un saut dans le vide et ça, c’est vrai que c’est un confort par rapport à d’autres vrais entrepreneurs et pas intrapreneurs. Parce que je vous ai dit, j’ai été entrepreneur aussi dans une vie précédente. Sans le backup d’un groupe comme EDF, c’est plus stressant. La nuit, on dort un petit peu moins bien. Et puis quand on veut faire les choses, on les fait moins vite parce qu’on a moins de moyens, on a moins de support, on a moins d’accompagnement, donc plus de stress. Donc, par rapport à tous ces éléments et donc l’encadrement, l’intrapreneuriat, c’est beaucoup plus intéressant pour moi que le pur salariat. Et par rapport à un entrepreneur, il y a beaucoup moins de stress, il y a un meilleur accompagnement et un accompagnement à tous les niveaux. Aujourd’hui, j’ai la direction juridique d’EDF qui va être en back up. C’est une direction juridique qui gère des actifs industriels qui valent des milliards. Donc c’est quand même le top niveau en termes d’accompagnement. Si j’ai un problème au niveau des risques, j’ai l’accompagnement au risque du groupe EDF. Donc pour toutes ces raisons, c’est vrai que ça a un gros avantage d’être chez EDF plutôt que d’être entrepreneur seul.
Lire plus : Le trilemme de la blockchain : un casse-tête insoluble !
Est-ce qu’il y a des crypto au sein de la comptabilité d’Exaion ?
Oui, parce que pour proposer certains services sur les nœuds Exaion Node, on a besoin d’avoir accès à des nœuds, soit en tant que validateur de nœuds, soit en tant que stakers. Donc, pour les besoins de notre activité, on est obligés d’avoir certaines crypto qu’on doit mettre en collatéral pour avoir le droit d’opérer sur les nœuds en question. Donc oui, on en a.
Sur quelle blockchain travaillez-vous actuellement ? Comment est-ce que vous les sélectionnez ?
On a un filtre, une matrice qui intervient à différents niveaux. Déjà ce qu’on essaie d’éviter c’est des protocoles trop énergivores. Donc nous on aime bien les protocoles en proof-of-stake, de troisième génération. Donc là sur la plateforme on va proposer Tezos, Avalanche, ce genre de protocoles blockchain plutôt. Ensuite, on va être sur certains projets où on était parmi les équipes fondatrices du projet ou dans le conseil d’administration ou parmi les initiateurs comme l’Energy Web Foundation. C’est un projet qu’on a hérité du groupe EDF parce qu’EDF était parmi les validateurs du réseau Energy Web Foundation qui est américain, et on gérait les nœuds pour le compte du groupe EDF. Donc cette activité, on la continue sur la plateforme. On a Ethereum qui était en proof-of-work et qui est aujourd’hui en proof-of-stake, donc on a été mineur au début pour pouvoir donner à nos clients, les ethereums dont ils avaient besoin pour lancer leur smart contract. Et puis dès qu’ils sont passés en proof-of-stake on était les premiers opérateurs dessus. Et aujourd’hui, on est complètement dans le Ethereum 2.0 proof-of-stake. Puis après il y a des protocoles de type Bitcoin. On ne mine pas et on ne minera jamais le bitcoin. Par contre c’est le plus gros protocole mondial. Je ne me vois pas non plus dire à cet univers d’initiés et d’acteurs du monde de la blockchain “Je ne vous proposerai aucun service sur le bitcoin”. Moi, je leur propose un service sur Exaion Node qui leur permette de venir faire du big data, d’explorer les blocs et de rentrer dans l’information historique du bitcoin. Il y a aussi les smart contracts qui peuvent être développés sur Bitcoin. Peu de gens le savent, mais ce n’est pas le plus efficace. Mais pour ceux qui veulent développer des smart contracts ou des projets sur bitcoin, ils le peuvent aussi sur la plateforme mais par contre, je tiens à préciser qu’on n’est pas des mineurs de Bitcoin. On a miné 0 bitcoin parce que c’est hyper énergivore. Et ça, ce n’est pas dans notre ADN. Après, il y a d’autres protocoles qu’on filtre différemment. Et nous, ce qu’on appelle les protocoles nobles, ce sont des protocoles qui vont permettre aux grandes entreprises ou aux entreprises ou aux développeurs blockchain de pouvoir développer un applicatif dessus. Donc les protocoles qui permettent de développer des smart contracts nous intéressent parce que derrière, c’est de la mise en place de nouvelles manières de faire, de nouveaux usages. Par contre, il y a aussi des protocoles dont l’attribut principal, c’est de pouvoir faire des transactions financières sous les radars pour le Dark web. Ça, on ira jamais car pour nous ce n’est pas noble.
Vous êtes la première filiale d’un grand groupe à vous être lancé dans la blockchain, donc par la suite, il y a eu d’autres entreprises qui s’y sont lancées. Est-ce que Exaion a été sollicitée par ces entreprises pour avoir des conseils sur ces projets-là ?
Oui, effectivement, on a l’habitude d’entendre sur différents médias que EDF est peut-être une entreprise un peu frileuse. Ce n’est pas du tout le cas. Franchement, EDF est la première grande entreprise à avoir lancé une filiale Blockchain en 2020, sachant qu’on était déjà incubé depuis quasiment juin 2018. Juin 2018, c’est le crash des cryptos, c’est le dark web, c’est tous les mauvais attributs et adjectifs qu’on pouvait coller à la blockchain. Donc quand on a décidé d’y aller, c’était vraiment le rodéo et on n’a pas eu peur d’y aller pour différentes raisons. Quand j’ai parlé de projet blockchain à EDF, j’étais déjà un fonds de Venture Capital. On ne m’a pas dit “jamais”. La question qu’on m’a posé, c’est “mais pourquoi ?”. Parce que c’est un monde qu’on ne connaît pas, à quoi ça sert et en quoi est-ce que le groupe EDF peut être légitime dans ses activités ? Puis, si tu réponds à ces questions là “why not”. Et là, on a mis en place des éléments de réponse à des cas d’usages qu’on a présentés au groupe EDF. On a fait un road show auprès de toutes les directions : financière, risques, communication, juridique, RH, R&D… Chacun, on leur a pitché ce qu’on avait en tête. Et puis on a affiné aussi notre projet d’entreprise, à chaque fois qu’on a eu ces réunions avec ces différentes directions. Mais à aucun moment on nous a dit “jamais, hors de question”. On n’a pas eu de réactions de type “La blockchain égale dark web et le blanchiment”. En revanche, on nous a dit “faites attention et soyez toujours sur la partie institutionnelle des choses et ne passez surtout pas de l’autre côté. Tant que vous faites des choses pour créer des smart contracts, pour digitaliser des activités physiques, pour réduire l’impact carbone, pour améliorer, optimiser le fonctionnement des choses, il n’y a aucun souci”. On n’a pas eu de carton rouge ou de grosses craintes comme les gens nous connaissaient parce que ça faisait quand même dix ans qu’on était chez EDF. Ils savaient qu’on était aussi sérieux, qu’on était de profil travailleur, carré, consciencieux. Donc EDF ne s’est jamais opposé et ne nous a jamais freiné dessus.
Par contre, on nous a demandé des explications sur ce qu’on voulait faire, à quoi servait la tech et en quoi ça permet au groupe EDF d’être hyper avant-gardiste sur ces sujets. Et un tiers des cas d’usage blockchain sont des cas d’usage énergétiques : la gestion de la recharge des véhicules électriques, la traçabilité d’électricité, l’échange d’électricité en peer to peer… Je peux vous en citer plein de comme ça. Et plutôt que de subir encore une fois, EDF et dans une logique d’anticiper les innovations et les ruptures de marché. Et ça, c’est hyper intéressant. Dans la foulée de la création d’Exaion, il y a eu Forge, mais vraiment ça s’est joué à quelques mois, deux ou trois mois grand maximum. Ils étaient dans la même logique que nous, depuis la même période que nous. Donc ça s’est un peu fait en parallèle dans deux entreprises différentes. Eux, sur le volet financier, nous sur le volet infrastructurel. Donc il y a Forge qui a eu aussi le courage de tirer très vite. Mais c’est dans leur histoire avec les produits structurés notamment. Ils ont toujours été hyper innovants. Et puis après on voit plein de grands groupes qui viennent nous voir. Je ne peux pas vous les citer, mais d’autres banques, des assurances, des énergéticiens qui viennent nous voir et qui nous disent “Comment est ce que vous avez fait pour créer Exaion ? Et comment avez-vous fait pour convaincre votre hiérarchie de le faire ?” Parce que chez nous, la direction juridique a peur, la direction communication a peur des bad buzz… Donc “Comment est-ce que vous avez fait pour contourner ces sujets-là ? Et puis, qu’est-ce que vous nous conseiller ? Parce que dans notre secteur à nous (assurantiel, logistique, énergéticiens), la blockchain a un gros intérêt. Mais on n’arrive pas à faire acter par notre direction ou par nos supérieurs la nécessité de créer à minima une direction ou une filiale.
Et ça fait trois ans qu’on essaye”. Des entretiens comme ça, on en a fait une dizaine sur la place de Paris. Prenez le CAC 40, on a fait un quart des boîtes peut-être où on leur donne un feedback. Et puis souvent on a même une deuxième réunion derrière où dans un premier temps, ce sont les porteurs du projet. Et puis dans un second temps, c’est leur chef. Il y a même eu la présidente directrice générale de la boîte qui était là et on leur avait pitché Exaion et comment ça s’était fait, quelles étaient les lignes que nous avait imposées EDF à ne pas dépasser pour que eux puissent réfléchir et puis potentiellement incuber un projet.
Aujourd’hui, la grande question qu’a notre audience, c’est est-ce qu’Exaion recrute ?
Oui, Exaion recrute et on double à peu près de taille tous les ans. Au moment où je vous parle, on est 40. On continue sur cette lancée. Donc oui, on recrute et on recrute différents profils. On recrute des profils techniques. Et quand je dis technique, c’est un vaste monde, ça peut être développeur Blockchain, ça peut être le développeur full stack, ça peut être l’expert en sécu, cyber sécu, infra réseau, ça peut être du développeur front end, des personnes qui interviennent sur l’ux des sites… Après, on a aussi besoin de commerciaux. On a aussi besoin de gens dans le marketing, de personnes dans la communication, dans les ressources humaines, sur la cybersécurité, sur la conformité… Au début, vous êtes trois. Donc moi, CEO, j’avais dix emplois, Laurent, il en avait dix. Sauf qu’au fur et à mesure qu’on grandit, j’aurai peut-être un jour plus qu’une casquette. J’en ai encore deux ou trois. Mais l’idée, c’est d’avoir du middle management et puis avoir une cascade de CEO et pas avoir une casquette de CEO et plus.
Et pour conclure cette interview, est-ce que tu aurais des conseils que tu pourrais donner aux étudiants qui veulent justement s’orienter dans la blockchain concernant le choix de stage, de structure du cv ?
Tout ce que je recommande aux jeunes, c’est vraiment de miser sur la qualité des projets, sur une carrière à long terme, sur des projets à long terme, sur l’intérêt et la passion qu’ils ont pour le projet dans lequel ils s’engagent. Parce que s’ils sont passionnés, rigoureux, travailleurs, sur un projet qualitatif de long terme, ils se retrouveront financièrement.
Mais il ne faut pas que l’objectif premier soit financier. Il ne faut pas se dire “pour devenir millionnaire en moins de cinq ans, il faut que j’aille dans la crypto et que je fasse n’importe quoi et que je place mon argent n’importe où et sur n’importe quoi”. Parce que non seulement vous risquez de ne rien apprendre, de tout perdre et de perdre beaucoup de temps, parce que vous allez devoir recommencer à zéro avec aussi un petit peu d’amertume. Et vous revenez sur le marché du travail beaucoup moins positivement que ce que vous auriez pu avoir comme approche à la sortie de l’école.
Puis, vraiment, c’est ce que j’ai toujours dit aussi : si vous êtes le meilleur dans ce que vous faites, quel que soit votre métier, si l’objectif est financier à la fin ça devrait suivre financièrement. Mais ça ne doit pas être l’objectif numéro un parce que c’est la meilleure façon de se planter.
Pour toutes les personnes qui se sont reconnues dans ce que tu as dit, quel est le meilleur moyen de vous contacter chez Exaion ?
Déjà pour ceux qui cherchent un stage, une alternance, un CDI : ils peuvent, nous écrire sur recrutement@exaion.com. Sinon, il y a contact@exaion.com pour d’autres sujets de business, de partenariat… Vous pouvez me contacter aussi directement sur LinkedIn. Il y a la page Exaion aussi sur Linkedin. On est plus ouvert. À chaque fois que quelqu’un cherche à me contacter comme vous, on vous a répondu, vous êtes là, on échange.