Dans quel contexte Polkadot est-il né ?
On peut considérer que jusqu’en 2015, deux grandes blockchains ayant des propositions de valeur totalement différentes ont vu le jour : Bitcoin et Ethereum. Ces deux blockchains ayant rencontré un succès important se sont heurtées aux limitations engendrées par ce que Vitalik Buterin a nommé le trilemme de la blockchain.
- Trois éléments composent ce trilemme :
- La Scalabilité (ou capacité de se mettre à l’échelle, c’est-à-dire d’assurer un même niveau de performance dans le traitement des transactions quand le volume augmente).
- La Décentralisation (pour empêcher le contrôle de la blockchain par une poignée de personnes, augmenter sa résilience aux attaques)
- La Sécurité (pour protéger les utilisateurs)
Chaque blockchain va placer le curseur à l’intérieur de ce triangle en fonction de sa proposition de valeur. Il est évident qu’aucune blockchain n’est capable nativement de proposer un modèle se targuant de couvrir les 3 éléments en même temps. Cela a eu pour conséquence d’obliger les premières blockchains à faire évoluer leur modèle : (Ethereum avec l’avènement des layers 2, le changement de consensus… avec pour objectif premier d’améliorer la scalabilité, Bitcoin dont le layer 2 est Lightning network). Cela a aussi entrainé l’émergence de nouvelles blockchains avec de nouvelles propositions de valeur: (Solana, Aptos performances élevées, BSC nativement clone d’Ethereum propose des frais de transaction optimisé, etc. …).
Aucun de ses écosystèmes monolithiques n’est capable d’absorber seul un nombre de transactions très élevé tout en assurant la sécurité et la décentralisation. Gavin Wood eut une idée. Créer un écosystème interopérable en interne et avec les écosystèmes blockchain externes : Polkadot est né.
Lire plus : Le trilemme de la blockchain : un casse-tête insoluble !
Polkadot : proposition de valeur et fonctionnement
Polkadot est un écosystème assez complexe de prime abord. Je parle délibérément d’écosystème Polkadot et pas seulement d’une blockchain car cela serait trop réducteur.
Cet écosystème est composé de deux « blocs » principaux
- Le cœur de l’écosystème Polkadot que l’on appelle la Relay Chain. Elle constitue LA blockchain principale du système. Elle fournit les garanties de sécurité de l’ensemble du réseau et de ses clients. Elle permet d’effectuer les transactions principales de Polkadot et de connecter les blockchains spécialisées entre elles.
- Les blockchains spécialisées ou sous-jacentes que l’on appelle « Parachains et Parathreads ». On peut les voir comme les satellites de la relay chain. Elles ont pour rôle d’offrir des services divers aux utilisateurs (Defi, metaverse…). Chaque blockchain spécialisée est développée à partir d’un cadre préconçu nommé Substrate et disposent de composants personnalisés. Pour situer qui sont les blockchains spécialisées nous pouvons citer Moonbeam, Phala, Bifrost, Acala, etc…
Alors que d’autres réseaux blockchain permettent aux développeurs de créer des dapps (applications décentralisées) à l’aide de contrats intelligents. Polkadot donne aux développeurs un contrôle total sur la blockchain sous-jacente elle-même. Cette flexibilité donne aux développeurs la liberté maximale pour optimiser leur parachain. Ceci pour n’importe quel cas d’utilisation. Ce qui signifie des dapps et services optimisés et plus sécurisés pour tous. Polkadot assure l’échange de données entre les parachains mais aussi avec les blockchains externes via le protocole XCM au travers de ponts. Tout cela constitue la base d’un Web décentralisé et interopérable, ce que Gavin Wood qualifie de Web 3.
Bénéficier des services offerts par la relay chain n’est pas gratuit. Le modèle économique des parachains et des parathreads est différent. Alors que les premières nécessitent un abonnement permanent aux services de la relay chain, les secondes vont utiliser un abonnement « on-demand ».
Lire plus : Web1.0, Web 2.0, Web 3.0 … Tout comprendre
Le consensus de la blockchain Polkadot
Polkadot utilise un dérivé du consensus de preuve d’enjeu (POS), nommé le NPOS (nominated proof of stake). Le NPOS à la différence du POS limite le nombre de validateurs du réseau. Ceci afin de limiter la décentralisation de la blockchain au profit de sa scalabilité. Actuellement, un bloc est généré toutes les 4 à 6 secondes et l’objectif est de tendre vers 2 secondes.
Dans l’écosystème Polkadot nous trouvons un certain nombre d’acteurs, chacun jouant un rôle bien précis.
On distingue : les nominateurs et les validateurs composants essentiels de la relay chain. Puis les collateurs propres à chaque parachains/parathreads et les pêcheurs.
- Les Nominateurs: contribuent à sécuriser la relay chain en sélectionnant des validateurs fiables par un processus de délégation des tokens dot mis sous séquestre (stakés). Un utilisateur peut être un nominateur au même titre qu’un pool de staking.
- Les Validateurs : Mettent sous séquestre une quantité très importante de tokens Dot et sécurisent la relay chain en validant les transactions provenant des collateurs. Ce sont eux qui écrivent les blocs sur la relay chain.
- Les Collateurs : gèrent les parachains et parathreads en collectant leurs transactions (générées par les utilisateurs) et en les soumettant aux validateurs avec les preuves associées.
- Les Pécheurs : surveillent le réseau et transmettent les mauvais comportements aux validateurs. Ils sont sanctionnés s’ils accusent à tort et récompensés dans le cas contraire.
Si l’on fait un parallèle Polkadot propose à l’univers blockchain ce qu’internet a proposé pour faire communiquer des ordinateurs ne faisant pas partie d’un même réseau dans les années 80-90 à savoir : un réseau mondial de communication. Cependant Polkadot n’est pas la seule blockchain interopérable et des évolutions importantes sont encore à réaliser pour tenir les promesses initiales.