La réglementation est un élément fondamental pour l’adoption de la technologie blockchain. Elle évolue et la survie des entreprises crypto en dépend. Les conférences et tables rondes pour aborder ces thématiques se multiplient. Parmi elles se tenait ce mardi 6 décembre 2022 au Palais Brogniart la table ronde “PSAN, MiCA, TFR : comment préparer votre entreprise?” organisée par la Paris Blockchain Society avec La Place Fintech. Pour en parler, un panel composé d’experts de la réglementation : Faustine Fleuret, Présidente de l’ADAN, Hubert de Vauplane, Partner chez Kramer Levin, Augustin de Menthière, COO chez Summit Mining et Antoine Collé, Head of compliance chez Coinhouse.
Où en est la réglementation dans le Web 3?
La réponse est simple : il n’y a pas de réglementation dans le Web 3 ! Il est aujourd’hui difficile d’appliquer une réglementation à des réseaux décentralisés. Hubert de Vauplane l’illustre justement avec la difficulté qu’ont rencontré les régulateurs américains en août 2022, lorsque l’OFAC a prononcé une sanction contre un protocole. Le reproche avait alors été porté sur le fait que le régulateur n’avait normalement le droit que de sanctionner des personnes, mais il a décidé de geler les adresses des différents wallets et utilisé sa compétence vis-à-vis d’un protocole !
Globalement, trois types d’attitudes sont adoptées par les Etats :
- Je régule, plus ou moins bien (modèle européen)
- Je régule avec des sanctions (modèle américain)
- J’interdis (modèle chinois/marocain)
Aujourd’hui, “la France est peut-être en avance car on n’a pas vu de pays européens être aussi moteur que nous” ajoute Faustine Fleuret, Présidente de l’ADAN.
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Où se situe la France et l’Union Européenne en termes de réglementation dans le Web 3?
Les premiers éléments de régulation sont arrivés en France avec le marché primaire donc les ICO (Initial Coin Offering), pour du financement dans un stade très early via des crypto actifs. Il y avait des opportunistes, donc beaucoup de fraudes, ce qui a poussé l’AMF à s’y intéresser. Puis est arrivé le marché secondaire durant la loi PACTE.
Il y a trois volets de règlementation : le visa de l’AMF pour les ICO, l’enregistrement PSAN et l’agrément optionnel des PSAN.
Qui sont les PSAN et quels sont les challenges pour être enregistré PSAN ?
Toutes les activités qui vont rendre des services “d’investissement” rentrent dans cette catégorie : échanges d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques, échanges d’actifs numérique contre des monnaies FIAT, conservation d’actifs numériques, conseil, gestion, etc.
La création du statut de PSAN est cruciale pour pouvoir entreprendre son activité et les attentes du régulateur ne sont plus les mêmes que lors du commencement. La taille des dossiers demandé a triplé et l’ACPR peut désormais vous poser des questions sur le reporting par exemple.
Les limites rencontrées par les entreprises pour devenir PSAN
Devenir PSAN ne se fait pas en 1 jour. Si théoriquement, un enregistrement PSAN prend 6 mois à partir de la réception de l’AMF, dans la pratique, c’est bien au delà. Les entreprises attendent en moyenne plus d’un an pour obtenir l’enregistrement PSAN ! On compte aujourd’hui 54 entreprises PSAN sur l’ensemble du pays.
Sans l’agrément PSAN, il n’est pas possible d’exercer son activité. Cela pousse les entrepreneurs à se poser deux types de question :
- Si vous êtes sur fonds propres : vais-je survivre sans pouvoir grandir (en figeant mes procédures) ?
- Si vous avez levé des fonds : mes investisseurs sont-ils enclins à financer le temps d’attente d’obtention du label ?
Les conseils pour être enregistré PSAN
Tout d’abord, parlez le même langage que le régulateur : inutile de dérouler vos connaissances techniques et de démontrer que votre technologie est géniale, le régulateur souhaite simplement voir à quel point vous comprenez la protection de l’épargnant. Soignez l’aspect narratif, le dossier est extrêmement important.
Ensuite, engagez un compliance officier (interne) et un conseiller externe pour avoir quelqu’un qui fait le lien avec le régulateur : la régulation change tout le temps et il est important de connaître les dernières questions qui sont posées par l’AMF, voire d’anticiper les questions pour avoir un dossier qui sera plus vite vu.
Enfin, rassurez le régulateur quant à vos connaissances : ne laissez pas le conseiller parler à votre place tout le temps, mais prenez les rênes pour montrer que le jour où le conseiller ne sera plus là, vous garderez la vision et les valeurs exposées.
Que prévoit MiCA ?
Markets in Crypto Assets (MiCA) a pour objectif d’encadrer le marché des crypto-actifs, qui échappe aux règles de la finance traditionnelle. Les règles qui s’y trouveront sont très similaires à MIF 2 et MAR (le règlement européen Abus de marché). Les acteurs concernés par MiCA sont les intermédiaires (marché), les émetteurs et les émetteurs de stablecoin.
“Pour nous, le PSAN, c’est vérifier ce qui rentre et ce qui sort, alors que le CASP [agrément prévu par MiCA], c’est vérifier ce qu’il y a dedans” explique Augustin de Menthière, COO chez Summit Mining.
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