Après le fiasco de la ligue des champions au stade de France et la vente faux QR codes, des voix se sont élevées sur Twitter expliquant l’intérêt des NFTs. Pourtant, même durant les évènements Web 3, la démocratisation des tickets NFT n’a pas eu lieu. Pourquoi ?
I. Pourquoi cette solution avait du sens
Le scalping, ou la spéculation sur les billets
Le scalping, la spéculation sur l’achat et la revente de billets, pourrait être empêchée grâce à la traçabilité. Selon Imperva, 40% des tickets revendus en ligne le sont par des bots, ce qui est énorme. Les grands noms du secteur comme Eventbrite ne parviennent pas à endiguer l’activité. Via des API faisant une série de taches automatiques, des forms-filler scripts et des faux papiers d’identité, ces reventes sont duplicables à l’infini.
La blockchain permettrait une régulation du prix des billets, avec l’impossibilité de spéculer, pratique parfois utilisée par les artistes eux-mêmes.
Empêcher la falsification
En moyenne, 12% des personnes qui rachètent un ticket de concert ou de match se font arnaquer par un faux. Ce chiffre inclut l’achat de tickets à des passants devant les stades de football : trop de fans se font encore avoir. La possibilité de consulter l’ensemble des transactions permises par la blockchain pourrait permettre de remédier à ce problème.
Combler la perte de revenu durant les reventes
Le marché secondaire, avec tous ses dangers de fraude, est néanmoins une masse économique conséquente sur lesquelles les émetteurs de tickets n’ont pas tout à fait réussi à conquérir. Les smart contracts, avec une commission de 5-10% sur toutes les transactions suivant la vente, pourrait offrir aux entreprises des revenus supplémentaires.
II. Pourquoi l’adoption n’a pas lieu
Sur le papier, cette solution apparait donc comme idéale pour les émetteurs de tickets. Après les tests de nombreux entrepreneurs, plusieurs problèmes voient le jour.
Trop de congestion et frais de gaz élevés
Les NFTs devant être signés à l’arrivée dans le stade souffrent de problèmes de scalabilité. Selon Melvin Wong, ex-entrepreneur du secteur, c’est même sa plus grande barrière à l’entrée: pour un système parfaitement sécurisé, il faudrait trois transactions au minimum :
- Celle durant l’achat du ticket,
- Le scan à l’entrée,
- La suppression du QR code, pour empêcher sa réutilisation.
On peut admettre que trois transactions sont excessives, et que le simple fait de montrer sa clé publique pour prouver que nous sommes bien le propriétaire suffirait. Mais si l’utilisateur reste off-chain pour la validation, pourquoi utiliser un NFT ? C’est en tout cas la solution privilégiée pour l’instant, avec l’utilisation de blockchains privées.
Un autre problème durant ses tests a été celui de la lenteur des validations, avec 4000 fans arrivant en même temps aux guichets. Là encore, les sidechains pourraient permettre de régler ce problème.
Un manque d’intérêt des entreprises du secteur
Une autre grande raison de ce manque d’adoption est le désintérêt des entreprises émettrices elles-mêmes. Maarten Bloemers, durant the future of NFT ticketing, montrait à quel point les émetteurs de tickets bloquaient l’adoption :
“Ils n’ont aucune raison de changer leur mode de fonctionnement actuel. Ils ne voient pas la valeur ajoutée.”
Quel intérêt pour Eventbrite de passer à l’utilisation d’une solution couteuse quand la simple inscription fonctionne déjà ? Puisque la technologie n’est pas une affaire d’adoption et pas d’obligation, la simplicité d’utilisation doit être le maître mot. Demander à ses utilisateurs de créer un wallet, de le connecter, de faire un virement, d’attendre la fin du transfert… La blockchain n’est tout simplement pas suffisamment démocratisée, du moins pas assez user-friendly.
III. Les solutions proposées
L’engagement post-event, un sujet creusé par les artistes
L’utilisation des tickets pour des bonus pourrait être la solution pour l’adoption de masse. Ces artistes pourraient alors fédérer des “gated communities” accessible via possession d’une “proof of attendance”. Pour les marques, ces technologies permettent de fidéliser les clients. C’est peut-être le futur des influenceurs qui est en train de naitre ici.
“Cette utilisation mènera à un revenu supplémentaire grâce à l’engagement des fans bien après l’évènement. Aujourd’hui, on ne fait que sortir avec un ticket souvenir. “
Après un concert de l’artiste Cascade, ces bonus ont servis à l’ouverture d’une zone sur le métavers Spatial, accessible avec un ticket.
Selon Joe Freire, ancien du secteur de l’évènementiel, ces vendeurs de tickets ne sont que des intermédiaires. C’est l’artiste qui a la capacité de créer de la valeur en fidélisant les fans. Au lieu de n’utiliser qu’une seule fois le ticket et le supprimer de son téléphone, il peut être un droit d’accès à des sites de fans clubs, à la manière des fans tokens. L’engagement sur le long terme est alors visé.
Les NFT ne sont pas la seule solution
- Les jetons semi-fongibles, ou SFT
À mi-chemin entre ERC-21 qui permet l’utilisation de tokens fongibles (ETH, MATIC) et ERC-721 de NFTs (crypto-kitties), ERC-1151 a pour but de réduire les couts de transferts exorbitants. Ces Semi Fungible Tokens peuvent être envoyés en un seul virement tous ensembles, avant de devenir des NFTs une fois dans le nouveau wallet.
Créés par l’équipe derrière Enjin, leur utilisation est aujourd’hui marginale, et ne permets de régler que le problème des frais à l’envoi.
- Les jetons fongibles sous forme de fan tokens
Le fait de posséder des fan tokens donne déjà accès à des loges spéciales et d’autres avantages lors d’évènements sportifs. Avec les premiers tests de GET protocol, et l’ICO d’un token pour l’évènementiel, le GET, cette solution a en revanche été stoppé après avoir prouvé ses faiblesses lors d’évènements à guichet limité.
Conclusion
Les tickets sous forme de NFT n’ont pas encore trouvé leur business model. Des problèmes techniques et de centralisation s’ajoutent au manque d’entrain des géants du secteur, qui préfèrent encore les solutions centralisées.
Néanmoins, la blockchain permet de fédérer les communautés. Offrir des avantages aux fans grâces à ses tickets pourraient être un nouveau revenu pour les marques, les musiciens, et engendrer des achats en plus de la part des fans.
“NFT ticketing is inevitable. But it will take some time”
Maarten Bloemers, créateur de GET Protocol.
D’autres solutions d’authentification comme la reconnaissance faciale pourraient aussi se démocratiser très vite, et a déjà fait ses preuves aux USA pour les vols longues distance.