« Nous entrons dans l’ère du streaming-plus de la musique, qui est l’un des rares secteurs d’activité à grande échelle où l’adoption de la technologie blockchain a un sens immédiat pour tout le monde », a déclaré Emmy Lovell, PDG par intérim de Napster.
Cette citation vaut aussi bien pour l’industrie musicale, que pour toutes les autres formes d’art.
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Aujourd’hui, où en sommes-nous ?
Pour générer de la valeur, l’artiste communique sur son art, puis vend ses œuvres, ou des droits sur celles-ci, crée un studio, travaille en freelance, effectue des partenariats… des sources de revenus à fortes barrières à l’entrée et/ou peu rémunératrices, qui rendent difficile de vivre de son art.
Demain, comment les NFTs révolutionnent-ils la génération de valeur pour les artistes ?
Les NFTs, ces actifs numériques uniques, vérifiables et traçables sur la blockchain qui leur confèrent rareté et authenticité numérique à la différence de fichiers classiques, permettent de supprimer les intermédiaires et font naître de nouvelles opportunités pour monétiser leur contenu.
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Nouveau canal de vente, nouveaux collectionneurs
Les artistes peuvent désormais créer des œuvres numériques uniques ou limitées et toucher un autre public. L’artiste diversifie sa distribution, et touche un public plus jeune, plus connecté, que celui du marché de l’art contemporain.
« Les collectionneurs de NFT viennent en grande partie du monde de l’informatique, certains de l’industrie des jeux vidéo parce que c’est une technologie nouvelle et pas forcément facile d’accès pour le grand public », explique Elizabeth Karoly (fondatrice du hub artistique 1703).
Néanmoins, certaines catégories d’œuvres restent indissociables d’un support physique. Peintres, sculpteurs et autres, peuvent désormais en proposer des dérivés via des reproductions numériques.
Pascal Boyart, peintre français, est le premier artiste à avoir créé des NFTs à partir de ses fresques murales. Il s’explique : “Mes fresques murales sont souvent effacées, repassées, taguées au bout de quelques semaines. Voire pire : censurée ! […] Il fallait trouver un moyen de rendre mes fresques immuables en leur donnant une valeur concrète grâce aux NFTs”.
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NFT Royalties et redistribution des revenus
Créer un NFT de son œuvre confère également l’avantage de disposer d’une source de revenu passive à long terme grâce au mécanisme des NFT Royalties. Lorsqu’un NFT change de main sur le marché secondaire, certains créateurs prévoient que toute revente entraînera leur perception d’un pourcentage du prix – généralement situé entre 5 % et 10 %.
Il s’applique en pratique sans limitation de durée ou de montant. Étant donné que ce droit est inscrit dans un smart-contract, il peut également bénéficier à un tiers et non nécessairement à l’artiste.
C’est notamment ce qu’a fait JuL lors de la sortie de son album Extraterrestre en juin 2022. Chacun des gagnants de son tirage au sort a eu accès à des avantages exclusifs, et trois d’entre eux ont reçu, pendant un an, l’intégralité des revenus YouTube du clip de la chanson adossée à leur NFT.
En cas de revente sur le marché secondaire, JuL en percevra 10% et 50% seront reversées à l’UNICEF.
Limites des NFTs Royalties
Tout de même, cette idée se heurte à des limitations techniques. Si un NFT est minté par un créateur sur une plateforme mais revendu sur une autre, alors c’est la première plateforme qui recevra les NFT Royalties. Elle devra manuellement reverser le montant à l’artiste.
L’une des solutions proposées est l’ERC-2891, pour prendre en compte directement l’attribution des royalties individuelles à une autre marketplace où s’est déroulée la vente. Seulement, l’intégration d’un standard se fait de manière volontaire. Encore aujourd’hui, Opensea ne l’a pas intégré – même si elle a promis de le faire dans les prochains mois.
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Aussi, depuis la fin de l’année 2022, certaines plateformes NFT n’appliquent pas totalement le paiement des royalties aux créateurs pour grignoter des parts de marché. Blur, plateforme de NFT venue détrôner OpenSea, est le cas d’usage. Blur repose en fait sur deux concepts principaux :
- Aucuns frais de plateforme dans le trading de NFT ;
- Royalties optionnelles, l’acheteur choisit s’il souhaite accorder une redevance à l’artiste.
D’après OpenSea, environ 80% du volume total de l’écosystème ne paie pas la totalité des royalties aux créateurs, et la majorité du volume est passée à un environnement sans frais. C’est pourquoi la plateforme a décidé de désactiver son Operator Filter, l’outil permettant de faire respecter les droits d’auteur sur la marketplace, le 31 août – rendant les royalties optionnelles depuis le 1er septembre.
NFTs, future de la génération de valeur pour les artistes ?
Les NFTs s’imposent comme catalyseurs de changement et représentent une innovation significative dans le domaine de la valorisation artistique. Ils éliminent les barrières traditionnelles, ouvrent de nouvelles voies pour les artistes, et marquent ainsi un tournant passionnant où technologie et art fusionnent pour redéfinir la manière dont la valeur est générée et partagée.
Cependant, des défis subsistent, tels que l’intégration de normes cohérentes pour la distribution des NFT Royalties. Reste à voir comment artistes, collectionneurs et plateformes s’adapteront.