Fin 2022, le géant de l’informatique IBM annonce la sortie de son dernier ordinateur quantique, Osprey. Sa puissance de calcul de 433 qbits en fait le plus puissant à ce jour. Doté d’une capacité de calcul immensément supérieure à celle de nos ordinateurs classiques, ce type de machine effraie certains membres de la communauté crypto, qui craignent que l’informatique quantique ne vienne un jour à bout des algorithmes cryptographiques de Bitcoin et ne condamne définitivement la technologie blockchain.
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Qu’est-ce qu’un ordinateur quantique ?
Un ordinateur quantique est un ordinateur développé en suivant les lois de la physique quantique. Ce type de machine n’existe que depuis récemment et on ne sait pas s’il sera un jour possible de s’en procurer dans le commerce.
La puissance des ordinateurs quantiques repose sur les qbits, équivalent quantique des bits classiques. Dans un ordinateur tel que nous les connaissons, les informations sont enregistrées sous formes de bits, qui sont des suites de 0 et de 1. Les qbits, eux, suivent les lois de la physique quantique, ce qui leur permet de se trouver dans plusieurs états à la fois. Cela permet d’améliorer massivement la vitesse de calcul en effectuant de nombreuses opérations en parallèle.
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Un ordinateur quantique pourrait-il attaquer le réseau Bitcoin ?
Certains craignent que la puissance déployée par ces machines ne devienne un jour si grande qu’elle soit capable de faire tomber le réseau Bitcoin. Mais est-ce vraiment possible ?
Un ordinateur quantique pourrait attaquer la blockchain de différentes manières. Une prise de contrôle totale de celle-ci nécessiterait d’attaquer l’ensemble de ses nœuds, dans un intervalle de temps réduit. Ce type d’agression ne peut se dérouler sans déployer une puissance de calcul de plusieurs milliards de qbits, la rendant ainsi hautement improbable pour au moins plusieurs dizaines d’années.
La menace la plus plausible viendrait d’une machine quantique qui, à partir de la clé publique d’un wallet, réussirait à déduire sa clé privée. L’attaquant disposerait alors de toutes les informations nécessaires pour dérober les fonds stockés sur le portefeuille.
Ce type de manœuvre constituerait un danger pour les wallets dont la clé publique a été révélée. Or, celle-ci n’est rendue visible que lorsque le portefeuille ayant initialement reçu les bitcoins effectue une transaction d’envoi par la suite. Selon un rapport de Deloitte, 25% des bitcoins seraient vulnérables à ce type d’attaque.
Source : Deloitte
Toutefois, les chercheurs de l’université de Sussex estiment qu’un ordinateur possédant une puissance d’au moins 13 millions de qbits serait nécessaire pour mettre en place ce type d’attaque, et qu’il en faudrait plus de 300 millions pour qu’elle ait des chances raisonnables de succès. De telles machines ne verront pas le jour avant de nombreuses années. Mais bien que le danger soit éloigné, il n’en demeure pas moins réel.
Mark Webber, qui a mené cette recherche pour l’université, déclare à ce sujet : “Les ordinateurs quantiques de pointe ne disposent aujourd’hui que de 50 à 100 qubits. Notre besoin estimé de 13 à 300 millions de qubits physiques suggère que Bitcoin devrait être considéré comme à l’abri d’une attaque quantique pour le moment, mais les technologies de calcul quantique évoluent rapidement avec des percées régulières qui affectent ces estimations et en font un scénario très possible dans les 10 prochaines années.”
Comment Bitcoin peut-il faire face à la menace des ordinateurs quantiques ?
Si les ordinateurs quantiques se développent et atteignent réellement une puissance capable de menacer le réseau Bitcoin, celui-ci va devoir réagir en utilisant un algorithme cryptographique post-quantique.
La cryptographie post-quantique est une sous-branche de la cryptographie qui vise à développer des algorithmes résistants aux potentielles attaques d’ordinateurs quantiques. Lorsqu’un nouveau portefeuille Bitcoin est créé, la clé publique de celui-ci est dérivée de sa clé privée, via une fonction mathématique impossible à appliquer en sens inverse. Mais comme nous l’avons vu, une machine quantique suffisamment puissante pourrait réussir à casser l’algorithme simplement en testant toutes les combinaisons possibles jusqu’à tomber sur la bonne.
Afin de se protéger face à cette menace, le réseau Bitcoin devrait remplacer son algorithme de dérivation actuel par un algorithme post-quantique. Toutefois, cette modification impacterait fortement la nature même du réseau, et nécessiterait certainement de passer par un hard fork.
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Ainsi, la menace des ordinateurs quantiques est lointaine pour Bitcoin, mais elle reste non négligeable. Dans l’hypothèse où elle viendrait à se réaliser, le réseau pourrait soit disparaitre, soit survivre en implémentant les améliorations nécessaires. Toutefois, la technologie blockchain dans son ensemble ne craindra pas l’ordinateur quantique : les algorithmes de cryptographie post-quantique sont déjà en développement et de nombreux projets avancent activement sur le sujet.